Dans le cadre de l'article sur la trousse de toilette et la présentation au public d'objets de la vie quotidienne en reconstitution historique, nous faisons ici un gros plan sur les boites de crème emblématiques de la marque allemande Nivéa. Sans doute plus intéressant pour le collectionneur d'objets de toilette ou d'épicerie que le reconstitueur à proprement parler, l'objectif de cette page est de dater, plus ou moins, les boites françaises de la célèbre marque.

Sujet bien développé en Allemagne, l'historique du design des boites allemandes est connu et même repris sur le site de la marque.  Il est intéressant de survoler les boites allemandes avant de se pencher sur les françaises, bien différentes.

Ci-dessous, des encarts de publicité des années 1937/1938. On y voit les différents produits alors présents sur le marché français: la crème en pot, en tube, en flacon petit format, la crème liquide en flacon et l'huile solaire.

Ces premières boites se différencient très facilement de celles postérieures par la présence des 3 flèches superposées dans les parties blanches du couvercle. Élément intéressant car on ne le retrouve absolument pas sur les boites allemandes de la même période, il s'agit là d'une particularité des boites "étrangères".

Voici donc les premières boites qui ont été commercialisées sur le marché français, dès les années 1930. L'année 1932 est avancée par la marque Nivéa elle-même pour ce début de commercialisation, mais aucune publicité de 1932 n'a encore été trouvée jusque ici.

Les 3 formats sont commercialisés:

• le format de poche 20g: réf. 362
• la boite moyenne 60g: réf. 368
• le pot familial 150g: réf. 363

La boite en tôle: 

Alors que les formats plus petits sont en aluminium, la boite au format familial est en tôle. Par ailleurs le fabricant de la boite est indiqué par un "V", ce qui n'est pas le cas sur les autres. Il devrait donc exister une boite aluminium référencée 363.

L'hypothèse actuelle est que les boites en aluminium ont encore étaient produites en Allemagne, alors que celle en tôle l'a été sur le sol français. Le "V" pourrait d'ailleurs être celui des établissements F. Vinatié de Bordeaux, le même qui fabrique la poudreuse Nivéa pour les bébés.

La boite réclame:

Cette boite au format poche en tout point identique à la boite de référence 362 présente un message publicitaire au dos. Elle adjoint les consommateurs à adopter la boite de format moyen en lieu et place de celle du petit format. L'argument étant les économies réalisées, celle de 60g à 5 Francs contenant trois fois plus de crème que celle à 2,5 Francs et ses 20g de crème.

Ne connaissant malheureusement pas encore les prix de vente des boites et leurs évolutions au cours des années 1930/40, je pense néanmoins que cet exemplaire publicitaire date des années 30, alors que la crème Nivéa n'est pas encore ancrée dans les habitudes des consommateurs.

La boite échantillon:

D'un diamètre de 28 mm et d'une épaisseur de 9 mm, la face avant reprend trait pour trait le graphisme de la version courante. Seul le dos est différent avec l'inscription "échantillon gratuit".  Difficile d'en dire plus sur la datation, logo flèches, on peut imaginer une diffusion dans les années 1930/1940.

Par ailleurs la forme juridique des Laboratoires Peloille apparait au bas du dos des boites  - Laboratoires Peloille S.A.R.L. Champigny sur Marne (Seine).

Dorénavant le fabricant de la boite (à distinguer de la crème) est indiqué. Celle-ci a été fabriquée par les "établissements Léon Chambon de Nantes". Cette entreprise fondée par Alfred Riom (mort en 1908) fut ensuite dirigée par Léon Chambon, lui-même décédé en 1933. Il serait intéressant de savoir quand cette entreprise a cessé de se nommer L. Chambon. 

Ci-dessous à gauche la boite de 1ère génération, la 2ème génération à droite.

Ci-dessous la boite au format familial (référence 25) de 2ème génération. En aluminium, elle a un diamètre de 96 mm et une  épaisseur de 23 mm.

Ci-dessous la boite de taille moyenne (référence 23). En aluminium, elle a un diamètre de 75 mm et une épaisseur de 16 mm.

La boite échantillon:

D'un diamètre de 28 mm et d'une épaisseur de 9 mm, la face avant reprend trait pour trait le graphisme de la version courante. Seul le dos est différent avec l'inscription "échantillon gratuit".  L'emballage quant à lui présente la raison sociale de l'entreprise  - Laboratoires Peloille S.A.R.L. Champigny sur Marne (Seine) - et à nouveau la mention échantillon gratuit. A l'intérieur du carton, en plus de la boite en elle-même, un petit dépliant vante les mérites de la crème Nivéa (sous toutes ses formes) et fait la promotion du talc et du savon pour bébé.

La boite commémorative:

De 1982 à 2007, le siège français de Nivéa se trouvait dans la commune de Savigny-le-Temple. A une date indéterminée de cette période (par déduction je dirais 1982 ou au plus tard 1992, pour un anniversaire "rond" et en l'absence de code barre), Beiersdorf a distribué une boite échantillon commémorative reprenant la boite originale.

De format légèrement plus grand que la "poche" (55 mm de diamètre contre 50 mm, épaisseur 13 mm), le couvercle reprend l'ensemble du texte et du graphisme original. Au dos apparaît la référence 25 de la boite au format familial de 2ème génération ainsi qu'une partie du message d'origine. Suivent ensuite les informations contemporaines : "1ère boite lancée en France en 1932", la référence et la contenance de 30 ml, la mention "échantillon gratuit ne peut être vendu" puis l’adresse du siège social de Savigny-le-Temple. L’ensemble ayant été produit en Allemagne. A noter justement la référence "367 VA 55" qui prouve une continuité dans le référencement –allemand- des boites.

Le contexte historique:

A la fin de la seconde guerre mondiale, au titre des réparations de guerre, l'entreprise allemande Beiersdorf perd la jouissance de sa marque sur le marché français. La création en 1949 de la "Parfumerie Nivéa" est le fruit de cette confiscation. Une nouvelle entité juridique est ainsi créée. Les laboratoires Peloille qui étaient jusqu'ici "concessionnaires" sont maintenant propriétaires.

Beiersdorf ne pourra racheter ses droits sur Nivéa France qu'en 1974 et ainsi entamer concrètement la procédure de standardisation internationale en terme de communication et de packaging.

1950-1952:

Cette nouvelle version de boite apparaît au début des années 1950.  Le graphisme de cette 3ème génération est fondamentalement similaire à celui du packaging original. Le changement opéré sur le couvercle consiste en la disparition des flèches superposées des parties blanches.

Ci-dessous quelques publicités du début des années 1950, la transition y est bien visible. 

Ci-dessous les formats 25 et 23 de la "première version de la 3ème génération". La boite au format moyen n'évolue guère par rapport au modèle précédent, juste les modifications évoquées dans le paragraphe précédent.

La boite au format familial 25 est apparemment fournie par un autre fabricant. A noter l'absence d'indication sur le fabricant et la typographie du S de Champigny-s-Marne qui n'est plus en italique.

Nouveau fabricant de boite? Fabricant supplémentaire? Aucune certitude à l'heure actuelle.

1952-?:

Ci-dessous les boites fabriquées par Somater:

Le format moyen en aluminium (référence 23) - diamètre 75 mm, épaisseur 16 mm; et le format familial en aluminium (référence 25) - diamètre 93 mm, épaisseur 23 mm.

Ci-dessous les versions fabriquées par "V", fabricant déjà visible sur la boite en tôle de première génération. Difficile d'en dire plus sur ce fabricant dans l'état actuel des connaissances. A noter néanmoins que la pointe du V de Nivéa s'arrête au même niveau que les autres lettres, alors qu'elle est plus longue sur les boites de Somater.

Les générations suivantes sont malheureusement plus difficiles à déterminer. En effet, la crème Nivéa en boite étant déja bien implantée sur la marché français, la marque va surtout communiquer sur ses nouveaux produits tels que crème liquide, solaire etc.

Les pots de crème ne sont plus, ou beaucoup moins bien, illustrés dans les publicités. Or malheureusement, c'est la publicité qui est la source principale de datation.

A partir de 1955 apparait dans les publicités un pot neutre en terme de graphisme. Pourtant la charte graphique visible sur les produits mis en avant (ici la crème en tube) ne semble pas avoir évolué. Cette illustration sommaire du pot perdure jusque dans les années 1960. 

Seules véritables illustrations des années 1950 que j'ai pu trouver, ces publicités de 1953 et 1957. N'ayant pu observer d'autres illustrations et encore moins de boite, je pense qu'il s'agit d'une pure vue publicitaire destinée à mettre en avant un produit, déjà bien connu du public. Le message est simple, nom du produit et utilité.

Le design n'a cependant pas changé, grand bandeau bleu portant la marque, le tout sur fond blanc. 

 Il est difficile de définir le type de liens qu’entretenaient la parfumerie Nivéa et l’entreprise Beiersdorf dans les années 1950/1960. Indépendantes mais forcément liées, une réflexion commune sur l’évolution des packagings a dû être mise en place dès les années 1950.

Le modèle présenté ci-dessous, fabriqué par Somater, a le dos identique à la génération précédente. Le couvercle quant à lui change de génération. On élimine les phrases explicatives pour ne laisser que la marque. On se rapproche du modèle allemand, très sobre. Les dimensions sont toujours les mêmes que les boites plus anciennes.

Le bleu du couvercle est néanmoins plus clair que celui du dos du pot et le "cerclage" du couvercle a disparu. En l'état actuel des connaissances difficile d'en dire plus. 

Le couvercle retrouve son cerclage bleu, le texte reste le même. Cette fois-ci, c'est le dos qui est modifié et devient de plus en plus sobre, juste quelques lignes "mode d'emploi". A noter qu'on ne parle plus de "laboratoire" ni de "parfumerie" pour le lieu de production. Ces "cautions" de vocabulaire sont devenues inutiles et pourraient prêter à confusion. A partir de cette génération d'emballage, le fabricant de la boite n'est plus indiqué.

L'absence d'illustration exacte du design de la boite dans la publicité permet une évolution en douceur du packaging. Le pot neutre des réclames présente l'avantage d'aller à l'essentiel, rappeler simplement aux clients que la boite de leur crème préférée est disponible à la vente.

Ce pot a dû apparaitre au courant des années 1960. On retrouve le couvercle de la boite dite de transition de la génération précédente. Le bleu foncé devient plus clair et le cerclage ou liseré faisant le tour de la boite disparait. C'est la dernière étape avant de passer au pot entièrement bleu de 1970.

Le dos évolue également, on tend vers toujours plus de simplification au niveau du texte. C'est une crème pour la peau, point. On va à l'essentiel pour ne pas perturber le client.

Difficile d'en être certain pour le moment, mais la boite 23 tout aluminium semble laisser sa place à une boite hybride, au pot en aluminium et au couvercle en plastique.  On a beau retrouver les couleurs du pot familial sur le couvercle, la présentation est différente. Surtout, on y retrouve des "arguments" (nourrit, hydrate, tonifie) alors que ce dernier en était "libéré" depuis la 4ème génération de boite.

Tout comme la 25, le texte au dos est réduit au minimum. A noter l'indication sur la boite d'emballage en carton précisant que cette boite est nouvelle.

Voici ci-dessous un copié/collé des informations disponibles sur le site de Beiersdorf concernant l'historique "France". Je les reprends ici à titre de sauvegarde au cas ou le lien viendrait à ne plus fonctionner.

Les laboratoires NIVEA, aujourd'hui devenus Beiersdorf France, ont été créés en 1948. Bien avant, NIVEA Creme avait été lancée dès 1932. En 1948, une crème fluide NIVEA pour le visage est lancée, donnant naissance en 1960 à une gamme complète de soins visage. En 1977, NIVEA met sur le marché français un lait pour le corps pour tous types de peau. Les hommes ne sont pas oubliés : en 1989, NIVEA lance en France une gamme composée de 5 produits pour le rasage , l'après rasage et une crème de soin visage. Le baume hydratant après rasage NIVEA révolutionne le geste après rasage. En 1950, NIVEA lance ses premiers déodorants mais la gamme connait des difficultés et est arrêtée en 1970 pour renaitre avec succès aujourd'hui. En 1932, les Français découvrent le premier produit NIVEA solaire : l'huile solaire, vendue en pharmacie. La gamme NIVEA pour les bébés commence sa carrière en 1958, également en pharmacie, sous le nom de Babivea. En 1949, est lancée la première pommade à lèvres NIVEA qui deviendra plus tard Labello. Enfin Hansaplast est lancée dans les rayons de parapharmacie de la grande distribution en 1978.

Beiersdorf France est l'une des plus importantes filiales du groupe Beiersdorf. Le marché français est un marché très influent sur le marché du soin de la peau dans le monde. Aujourd'hui le groupe Beiersdorf France a établi ses 3 divisions : grand public avec les marques NIVEA, Labello, dermo-cosmétique et parapharmacie avec les marques Eucerin et Hansaplast et enfin parfumerie sélective avec la marque La Prairie qui possède des locaux indépendants. Les divisions grand public et dermo-cosmétique et parapharmacie sont situées à Paris (75013). Les équipes siège et terrain de 300 salariés s'engagent quotidiennement avec passion pour la réussite de nos marques. A noter : Beiersdorf France est associée avec Beiersdorf Belgique.

Lien vers l'agenda des reconstitutions historiques.

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